Une profession dynamique mais désorganisée
La France vient de prendre la présidence du Conseil européen des urbanistes (CEU). En Europe, des organisations professionnelles se sont constituées à l’échelle nationale pour défendre le métier et les compétences de dizaines de milliers d’urbanistes. Outre-Manche, le Royal Town Planning Institute (RTPI) représente 23 000 urbanistes membres. Par ses actions de lobbying, de formation continue et de consolidation des labels professionnels, le RTPI est un interlocuteur incontournable des pouvoirs publics chargés de la définition et de la mise en œuvre des politiques de l’urbanisme.
La présidence française du CEU sera « humble ». Car, hélas, il n’en va pas de même en France où chaque urbaniste ne peut que constater – avec stupéfaction ou indifférence - la faiblesse structurelle du mouvement associatif des urbanistes français. Non pas que la profession d’urbaniste en France n’existe pas, mais parce qu’elle n’est tout simplement pas organisée. Nous avons pourtant des atouts. Depuis 30 ans, les 12 instituts d’urbanisme de l’enseignement supérieur ont formé plus de 20 000 urbanistes, aujourd’hui en activité professionnelle au sein des collectivités locales, de la consultance privée, des sociétés d’aménagement, des services de l’Etat ou des bailleurs sociaux et institutions de l’habitat. Mais seulement 600 urbanistes sont répertoriés par l’Office professionnel de qualification des urbanistes (OPQU) et à peine 350 urbanistes seraient aujourd’hui représentés au sein de la confédération du Conseil Français des Urbanistes (CFDU). Moins que l’association des urbanistes de Malte, dit-on !
Notre profession brille aujourd’hui par son absence dans les tours de table ministériels sur « l’urbanisme de projet ». Pire, elle est aujourd’hui ridiculisée quand l’urbaniste est contraint d’endosser le rôle du sous-traitant dans le cadre de consultations internationales (à la mode du Grand Paris).
Comment en est-on arrivé là ?
Absence de convention collective, inexistence de dispositif mutualisé de formation permanente, audience beaucoup trop faible de la qualification OPQU dont le processus actuel met à l’écart les directeurs des instituts d’urbanisme universitaires, valorisation faible de la recherche appliquée, déclassement des diplômés en urbanisme dans la fonction publique territoriale depuis la fermeture de la spécialité urbanisme du concours d’ingénieur territorial à ces mêmes universitaires… Autant de leviers qui n’ont pas été actionnés.
Notre avenir dépend de nous … collectivement
Il nous faut rassembler les plus de 20.000 urbanistes français qui ne sont aujourd’hui pas représentés.
Si nous portons l'ambition d'organiser la profession d'urbaniste en France, nous devons, à l'instar d'autres professions (médecin, avocat, architecte, ingénieur), nous appuyer sur nos organes de formation. En à peine deux années d’existence, le Collectif National des Jeunes Urbanistes (CNJU) nous a montré la voie à suivre. Créé au cours de l’été 2009 et constitué en association en février 2010, il fédère aujourd’hui plus de 1200 urbanistes et 18 associations affiliées à des instituts d’urbanisme et formations supérieures en urbanisme (Master). Sa stratégie est la bonne car elle s'inscrit dans une logique fédérative et pragmatique : il faut s'appuyer sur le pilier de la formation, car la formation est le premier maillon et le plus robuste de la chaîne de l'insertion professionnelle.
Le temps est donc venu de proposer une véritable alternative, celle d'une association d'urbanistes de masse, fédérative, qui sache rassembler jeunes et seniors, salariés du privé et du public, tenants de tous les champs d'exercices professionnels. Et qui se fasse d'emblée sur la base d'une adhésion individuelle.
Nous ne serons pas toujours d'accord, nous pourrons avoir des intérêts un peu différents, mais nous devons être capables de porter la voix des urbanistes en phase avec notre époque.
Nous le serons en adhérant et en agissant ensemble.
Nos 8 convictions pour organiser la profession d’urbaniste en France
Créer une association de personnes physiques prêtes à défendre et à promouvoir la profession d’urbaniste, regroupant les urbanistes de tous modes d’exercice.
Faire reconnaître la profession d’urbaniste comme une profession à part entière en lui donnant un cadre réglementaire adapté.
Consacrer les 12 Instituts d’urbanisme de l’enseignement supérieur existants comme de véritables réseaux professionnels d’urbanistes habilités à délivrer des Licences professionnelles d’urbanisme, des Masters d’urbanisme et des Doctorats d’urbanisme.
Transformer le dispositif de qualification OPQU existant en une qualification partagée par les Instituts d’urbanisme et la profession (sur le mode des professions d’avocats ou d’experts comptables), donnant droit au titre d’urbaniste.
Développer un dispositif de formation continue propre à la profession d’urbaniste, en lien avec les Instituts d’urbanisme de l’enseignement supérieur.
Obtenir la reconnaissance de la profession d’urbaniste comme activité principale dans le cadre de la nomenclature INSEE des activités professionnelles.
Mettre en place une convention collective commune aux organismes privés et parapublics ayant l’urbanisme comme activité principale.
Faire reconnaître par voie législative la possibilité pour les urbanistes formés dans les Instituts d’urbanisme universitaires de candidater à nouveau à la spécialité « urbanisme, aménagement et paysages » du concours d’ingénieur de la fonction publique territoriale.
J’adhère en ligne à ces 8 convictions :
Bonjour,
RépondreSupprimerJe suis tout à fait d'accord avec vos 8 convictions, mais peut-être que la 8ème pourrait arriver en 3ème position dans la liste. En effet, aujourd'hui un urbaniste ne peut plus accéder à des postes d'ingénieur alors qu'il a les compétences requises.
D'autre part, peut-être que ce mouvement des nouveaux urbanistes pourrait profiter des futures élections présidentielles et interpeller les candidats sur ce sujet?
Continuez, vous avez mon soutien.
F.D jeune urbaniste
Ayant embrasser l'aménagement du territoire dans les années 70,au Centre d'Etudes Supérieures de l'Aménagement, j'ai mis bien longtemps à me considérer comme "urbaniste", la concurrence avec les architectes étant très forte et la formation ne conduisant pas à une reconnaissance du titre. Aujourd'hui l'angle d'attaque par les formations diplômantes me parait une très bonne chose. Cela permettrait d'avoir un socle commun a minima de formation pour les urbanistes, ce qui n'est pas le cas. La définition du métier par l'OPQU a été à mon sens une petite révolution, nécessaire mais non suffisante. Mais la lourdeur du dossier rebute plus d'un qui possède pourtant les qualités requises.
RépondreSupprimerLes agences d'urbanisme sont peut-être aussi parfois trop frileuses pour pousser leurs urbanistes salariés à se faire reconnaître par leurs pairs.